Gainsbourg, entre musique et controverse

Acteur, réalisateur, peintre, provocateur, Serge Gainsbourg est connu pour de nombreuses raisons. Au-delà de ses quelques rôles et de ses apparitions télévisées ayant fait scandale il a surtout une importance considérable dans la musique. Chanteur et compositeur, il lui aura fallu du temps pour construire son image et surtout produire des albums reconnus. Avec le temps, quelques-uns de ses disques sont devenus de véritables classiques de la chanson française, inspirant même à l’international. Excentrique, versatile, novateur, il ne s’est rien interdit et a une carrière à cette image, en montagnes russes. Personnage controversé aussi bien pour son attitude que par les messages qu’il pouvait faire passer dans ses textes, son côté dérangeant a souvent été éclipsé par l’aura de sa musique. Aussi bien auteur pour lui que pour d’autres, il aura déjà inspiré de son vivant, mais surtout encore après sa mort, en étant samplé dans de nombreux morceaux de rap français.

Alors qu’aujourd’hui l’époque pousse et permet aux artistes de commencer de plus en plus tôt, Serge Gainsbourg, lui, a commencé la musique assez tard. D’abord intéressé par l’art pictural, il publie son premier album en 1958, alors qu’il a déjà 30 ans. Le succès n’est pas au rendez-vous, bien qu’un titre soit resté dans les mémoires à posteriori, Le Poinçonneur des Lilas. À l’image de ce succès limité, le rap français s’est très peu intéressé à son début de carrière. De ce premier album, il faut surtout retenir le titre 12 Belles dans la Peau.

Ce morceau fait partie des rares qui ont été samplés dans ses premières années de chansons. La boucle est signée L’artizan, les rimes sont de Sept & Soklak, sur un anti egotrip le plus poussé possible.

Parmi les quelques morceaux que les beatmakers français auront retenus de sa période peu rayonnante, il y a aussi Les Amours Perdues tiré de son troisième album. Une chanson qui parle, comme son nom l’indique, d’amour perdu. Un thème qui inspirera Odezenne pour Meredith, un titre qui traite lui aussi d’une perte.

Les années passent, le succès est toujours relativement absent, mais les albums continuent de sortir. Sur son disque Gainsbourg Confidentiel, le style est déjà changeant, mais les mélodies sont primordiales. La saison des pluies possède alors de quoi faire une boucle parfaite pour Hocus Pocus.

Ces années sans connaître le succès auront été nécessaires pour Gainsbourg. Avec le temps, il aura notamment pu gagner sa vie en écrivant des morceaux pour des chanteuses. Sa notoriété grandit grâce aux tubes, de France Gall, Juliette Greco ou encore Françoise Hardy. À cette même période il entretient une relation avec Brigitte Bardot. Loin d’être une simple info « people » l’actrice aura eu un énorme impact dans sa musique, et l’aura inspiré pour quelques morceaux. Le premier d’entre eux, du même nom que l’album dans lequel il est sorti, est Initials B.B.

Le morceau est un véritable succès, encore largement culte et essentiel dans la discographie de Gainsbourg. En tendant bien l’oreille, il est possible d’entendre les violons du refrain d’Initals B.B. sur Zorro de Sefyu.

La relation avec Brigitte Bardot aura été courte mais très fructueuse musicalement. Serge Gainsbourg et elle sortiront plusieurs titres ensemble, dont Bonnie and Clyde.

L’instrumental du morceau aura fait beaucoup d’émules, à plusieurs périodes dans le rap français. Qu’il s’agisse des années 90 avec MC Solaar, ou de l’année 2012 qui aura permis à Alkpote et Ateyaba de sortir un morceau, chacun aura trouvé son compte et son univers a mélanger à cette mélodie.

Les relations amoureuses de Gainsbourg ont été fondatrices dans son œuvre. Toujours à la même période, il sort Je t’aime… Moi non plus. Initialement, la chanson est écrite et chantée avec et pour Brigitte Bardot. Seulement quand elle est diffusée, le mari de l’actrice apprécie moyennement, et elle n’aura donc pas d’autres diffusions. Heureusement, peu de temps après, Gainsbourg entreprend une relation avec Jane Birkin qui acceptera de reprendre le titre en remplaçant Bardot.

Au final, le morceau deviendra majeur dans la discographie du couple, éclipsant presque la relation avec Brigitte Bardot. Là aussi, qui dit chanson essentielle dit de très grande chance de la retrouver dans le rap français. Encore deux époques et deux propos totalement différents, avec un véritable hommage de la part de Guizmo.

Dans cette période, décidemment très prolifique et importante pour sa notoriété, il écrit Requiem pour un Con pour le film Le Pacha. Le morceau est lui-même inspiré par la Symphonie du Nouveau Monde de Dvorak. Il aura permis à deux groupes légendaires des années 90 de poser leurs couplets. Notamment les X-Men qui feront l’un de leurs titres les plus connus.

À partir de là, Gainsbourg s’émancipera des formes classiques de la musique et des disques et proposera des œuvres toutes bien différentes. Au centre de ces albums majeurs, qui deviendront cultes dans l’histoire de la musique, se trouve par exemple Histoire de Melody Nelson. Les propos des morceaux peuvent s’avérer dérangeants, la forme elle est en tout cas relativement innovante. Certains titres font plus de sept minutes, comme Melody, qui a été samplé dans La magie du tiroir de 2 Bal 2 Neg.

D’autres morceaux sont, justement à l’inverse, particulièrement courts. Le plus bref d’entre eux, Valse de Melody ne fait qu’une minute trente. Malgré sa durée, quelques secondes auront su être intéressantes pour le groupe 113.

Parmi les concepts albums les plus connus de Gainsbourg, il y eu quelques années plus tard, L’Homme à tête de chou. Là encore, une histoire est racontée tout au long du disque, et la musique se trouve encore loin des standards de l’époque. Le premier titre, du même nom que l’album aura pu connaître une certaine prospérité à travers le sample d’un des groupes de rap les plus importants des années 90, Assassin.

Avec 17 albums studios à son compteur, Serge Gainsbourg aura forcément eu encore de nombreux titres samplés dans le rap francophone, et même ailleurs. Malgré tout, il reste un titre particulièrement classique dans sa discographie qui aura inspiré le rap de bien des façons.

D’abord, on peut entendre des extraits du morceau chez MC Solaar ou Eden Dillinger. Lord Esperanza ne se servira d’ailleurs pas du sample de manière toute simple, mais pour, derrière, faire référence au plateau télé cultissime où Gainsbourg brûla un billet de 500 francs.

Autre que les samples, et bien plus inattendu, Myth Syzer, beatmaker et chanteur, a sorti il y a quelques années une reprise du morceau de Gainsbourg sur Soundcloud.

Il y a aussi eu plusieurs reprises de variété française sur l’album L’Hip-Hopée – La Grande Épopée Du Hip-Hop Français, en 2000. Sur cette compilation, on retrouve deux morceaux de Serge Gainsbourg, dont No Comment, interprété par Stomy Bugsy.

De simples extraits de sa voix, à la reprise totale d’un morceau, en passant par des dizaines de boucles créées à partir de ses mélodies, Gainsbourg aura été malgré lui un élément majeur du rap français. S’il ne faut pas oublier ses dérapages, ses paroles et actes controversés, son œuvre est devenue essentielle dans l’histoire de la musique française. Rayonnant même à l’international, il semble évident qu’il inspirerait de nombreux beatmakers et permettrait à de nombreux rappeurs de poser leur voix.

Si vous aussi, vous avez déjà repéré un sample de Gainsbourg dans un morceau de rap, qu’il soit dans l’article ou non, n’hésitez pas à nous le dire sur nos réseaux. D’autres légendes de la musique ont été samplées dans le rap français, dont certaines que vous pouvez retrouver juste ici !